Savoir renoncer

L’orage vient d’éclater en ce début d’après-midi : cassant, bruyant, impressionnant. Depuis la fenêtre de mon bureau je regarde les éclairs qui font de grandes cicatrices furtives dans le ciel. Mon esprit vagabonde vers d’autres préoccupations et contrariétés de ces derniers jours.

 

Nous vivons dans un monde policé, régi par des milliers de règles, de dogmes et de lois formelles et informelles qui nous conduisent à décharger notre  stress contre ceux qui nous énervent  y compris parfois contre les personnes que nous aimons ou contre nous-mêmes et qui impriment en nous, comme ces éclairs, des blessures plus ou moins éphémères. Nos réponses corporelles et mentales sont parfois inadaptées. Comme en vol, la règle à ne pas dépasser, serait de garder juste ce qu'il faut de vigilance pour s'emplir de bonnes sensations sans se mettre en danger...


 

Michel est au club. Mon sac est prêt. J’aurais bien voulu voler ce soir. Foutu temps, il faut se rendre à l’évidence : ça ne va plus être possible. Je me dis « pas grave » pour essayer de me consoler mais .... j'aurais bien voulu voler ce soir.

Miracle, 2 heures plus tard, il fait grand bleu. Comme si le ciel n'avait gardé aucun rancune de cet épisode cauchemardesque et avait, d'un généreux revers de manche, balayé toute trace de sa méchante humeur.


J'en profite aussitôt pour envoyer un texto à Michel sur son portable et quelques minutes plus tard, j'ai son  feu vert. Chouette, on va pouvoir voler : à Epinal il  n'y a pas eu la moindre goutte de pluie. 

Au rendez-vous je suis présente à l'heure, Michel aussi mais le ciel bleu : non. Temps couvert, mais plafond haut, avec juste en face de nous un vilain "cumulo nimbus méchantissimus" qui n'inspire pas mon instructeur.


La chance ne sourit pas toujours aux audacieux, et il est des jours où le destin ne veut pas être en phase avec nos souhaits. Nous décidons d'attendre l'accalmie. Je m'occupe en faisant un brin de toilette à "Delta India" pendant que Michel termine un réglage sur l'ulm de Fred.
Comme le nuage n'a pas bougé d'un poil, et que ces derniers temps je me promène avec mon bouquin théorique dans le sac à main, je demande une ou deux précisions à Michel sur les calculs de niveaux de vol qui sont toujours ma bête noire.


Une heure et demi plus tard je pose une fois encore la question. "Alors, qu'est-ce qu'on fait ?". Michel regarde le cumulonimbus et fait la moue : "Non, il vaut mieux un vol de moins qu'un vol de trop" me dit-il avec philosophie. Alors que nous glissons les lourdes portes pour refermer le local, un grand coup de vent annonciateur d'orage viendra confirmer qu'il a fait le bon choix.

 

On se quitte sur ce rendez-vous manqué : la leçon du jour avait pour thème : savoir renoncer.

 

 

Mercredi 30 juillet 2008
Durée du vol  :  :o(

 

Cumul à Dogneville
10 h 20 mn

 

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