L'escalier du ciel

Dans la voiture qui m'amène à la base je préfère regarder défiler le paysage plutôt que parler tout en laissant flotter mon attention, en suivant ma rêverie...

 

Patrick est au volant, à ses questions, mes réponses évasives qu’il feint de croire.

 

Est-ce le temps qui passe, est-ce l’ennui face à cette activité professionnelle à l’égard de laquelle je me sens désormais tellement usée et qu’il serait temps que je quitte, 

Est-ce l’annonce d'une nouvelle qui me contrarie, est-ce parfois une certaine incompréhension de cette société,

Est-ce la pensée des contraintes matérielles et administratives qui rendent si compliquées mes affaires en ce moment, est-ce cette ultime précision de pilotage à régler, minime, mais qui m’agace,

Est-ce une simple et inévitable baisse d’énergie après des journées riches en activités qui m’avaient vivifiées ?

Un peu de tout cela sans doute.

 

Au moment où je suis descendue de la voiture, où j’ai retrouvé la base, j'espérais trouver mon instructeur en pleine forme.

C'est raté. Ecrasé par la chaleur de cette journée. Il me prévient  "Il va falloir bien piloter ce soir parce que je suis fatigué". Jean-Louis est là aussi et plaisante de mon manque d'entrain.
Prévol. Je m'installe aux commandes du combo et tourne la clef. Tiens ?  Rien.... Normal, je n'ai pas relevé l'interrupteur général...
Ca commence fort, il faudrait bien que je me réveille maintenant..


Heureusement l'émulation de l'air pilote et une fois lancée, je retrouve vite les joies du pilotage.
C'est justement l'un de ces soirs sans vent, dont rêve tout élève-pilote pour son lâcher. Hélas, ce ne sera pas aujourd'hui,  pas temps que cette marche dans l'escalier du ciel subsistera...

Après plusieurs essais infructueux, Michel me dit : "On va essayer quelque chose". Il se positionne en début de piste et commentant chacun de ses gestes sur la barre me fait une petite démonstration qui confirme ce que je savais déjà : j'en fais trop.


Prise de vitesse, il pousse lentement la barre et la maintien juste du bout des doigts. Bientôt, elle reprend de façon naturelle et au moment qu'elle a choisi une position adaptée à une montée en douceur.

Rageant !!! la machine fait seule ce que je ne suis pas capable de lui demander !


Bien sûr il ne s'agit pas de lâcher la barre ainsi à chaque décollage, mais cette démonstration réalisable par temps parfaitement calme vise à me faire prendre conscience que je dois accompagner en souplesse le mouvement naturel de la machine comme je sais le faire parfaitement pour d'autres phases du vol.
Je comprends bien mais tout à l'air tellement simple quand on sait le faire.


La grande différence que j'ai pu noter entre son pilotage et le mien, c'est  justement cette grande impression de facilité qu'on ressent. Quand on regarde Michel piloter, tenant la barre du bout des doigts, très détendu, faisant des tours de piste dix fois plus courts, il se dégage une impression de facilité, on se dit : "comme c'est cool de voler avec ce petit engin !".


On n’imagine pas tout ce qu'il faudra comprendre et ressentir, ce qu'il faudra expérimenter avant de savoir le piloter ainsi.



Carnet de vol : 2009
Durée du vol : 1 h 00

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